La voile viking

Rami Ibrahim

Publié le 05/08/2024

Cet article aborde l’industrie de la voile viking, sans laquelle l’expansion et même l’apparition du phénomène viking n’aurait probablement pas été possible. Nos informations viennent de deux sources: la recherche archéologique et la littérature.

Que dit la littérature?

Pas grand chose en fait! Selon les sources écrites et l’iconographie contemporaine, les Vikings utilisaient de la laine pour fabriquer leurs voiles carrées. Elles disent aussi que la toile à voile a été utilisée comme monnaie et moyen de taxation à partir de l’ère médiévale. Cette toile s’appelait vadmal en danois, vapmal en ancien suédois, et vaomal en nordique.

Heureusement, il y a beaucoup de pierres

La pierre est toujours l’une des meilleures amies des archéologues. Les pierres runiques ainsi que les pierres historiées de Gotland sont donc les premières qui viennent probablement à l’esprit en ce qui concerne l’archéologie. La différence principale entre les deux types de pierres est la façon d’exprimer leurs messages. Tandis que les pierres runiques transmettent leurs messages via le langage, les pierres historiées de Gotland transmettent leurs messages à travers les images.

Une histoire racontée par les pierres

A ma connaissance les pierres runiques ne donnent pas d’informations par rapport aux bateaux vikings. Il y a celles qui parlent des expéditions vers l’Est comme celle de Kälvesten à Östergötland en Suède, mais elles ne donnent pas d’informations précises en ce qui concerne la voile ou même les bateaux.

Par contre, les pierres historiées de Gotland nous fournissent assez d’images de bateaux et de voiles. Le manque de textes n’a pas empêché les chercheurs d’essayer d’interpréter ces images. Prenons les pierres connus par les noms suivants: Stora-Hammars I et Stenkyrka Smiss I.

Les deux pierres montrent une image d’un bateau dont la voile est très grande. Cette illustration de la voile correspond bien au concept de la voile carrée des vikings mentionné dans la littérature. L’image de la bataille

entre un groupe de combattants venant par bateau versus ceux qui sont débout sur la terre correspond aussi aux histoires racontées par rapports aux Vikings et leurs raids dans la littérature. Sune Lindqvist donne cependant une autre interprétation. Pour lui, ces deux images illustrent probablement la légende de Hildre dans la mythologie nordique. Cette théorie a été confirmée par le médiéviste Karl Hauck et réfutée par Michael Srigley qui pense que les images sur Stora Hammars I ainsi que Lärbro Tängel Gårda 1 et Ardre Kyrka VIII  représentent les trois épisodes principaux de la chute de Troie.

L’archéologie confirme ainsi l’apparence de la voile carrée accompagnée par les parties nécessaires pour l’installer sur une embarcation au début de l’âge Viking. Elle entérine aussi l’usage de la laine dans la fabrication des voiles Vikings.

Le bateau d’Oseberg

Les vestiges archéologiques du bateau d’Oseberg montrent qu’il s’agit du premier navire vikings ayant un mât et une voile. On observe toutefois dans le cas présent que la voile n’a pas remplacé le système de rames qui est toujours l’un des générateurs de mouvement de l’embarcation. Ce dernier a vraisemblablement été ajouté pour que le bateau ait davantage de vitesse pour une navigation côtière. Bien que le bateau d’Oseberg possède un mat et une voile et qu’il soit daté des alentours de l’an 800, soit au début du phénomène Vikings, ses autres caractéristiques n’indiquent cependant pas qu’il ait été utilisé pour effectuer des raids. On observe également que son franc-bord de seulement 0,65 mètre ne permet pas de résister aux sévères conditions de

l’océan et de mener des campagnes de pillage sur de longues distances.

Le bateau de Gokstad

Contrairement au bateau d’Oseberg, le bateau de Gokstad a beaucoup plus de caractéristiques de flottabilité. Celles-ci sont non seulement plus nombreuses mais elles offrent aussi un meilleur angle de rotation ainsi qu’un support pour le mat plus résistant. Par conséquent, le bateau Gokstad daté de 850 après notre ère est considéré comme un bateau de raid. A souligner ici que les vestiges de textiles trouvés dans les bateaux d’Oeseberg et de Gokstad n’étaient toutefois pas en assez bon état pour affirmer à 100% qu’ils faisaient partie de la voile. En revanche, ils confirment l’usage de la laine chez les Vikings.

Quant aux premiers fragments de voile scandinave, ils proviennent de l’église Trondenes. Leur analyse au carbone 14 les date à une période allant de 1280 à 1420. Là encore, ils sont fabriqués en laine. Un des fragments, Trondenes 06, a un oeillet de voile en corde cousu à la main. Cela prouve qu’il s’agit bel et bien d’un fragment de voile.

Revêtement de la voile

Les voiles en laine sont efficaces et fiables par vent fort grâce à leur élasticité. Cependant, la laine est perméable, d’où la nécessité d’une couche d’étanchéité. Des études archéologiques appliquées aux restes et fragments de voiles ont également montré que les Vikings utilisaient un mélange de revêtement comprenant de la graisse, du goudron et de l’ocre.

Sources:

Bill Cooke, Carol Christiansen, Lena Hammarlund, Viking woollen square-sails and fabric cover factor,The International Journal of Nautical Archaeology, Volume 31, Issue 2, 2002, Pages 202-210, ISSN 1057-2414, https://doi.org/10.1006/ijna.2002.1039.

Guðmundsdóttir, Aðalheiður. (2012). Saga motifs on Gotland picture stones: The case of Hildr Högnadóttir. Gotland’s Picture Stones: Bearers of an Enigmatic Legacy, Gotländsk arkiv. 59–71.

Hennius, A. (2018). Viking Age tar production and outland exploitation. Antiquity, 92(365), 1349-1361. doi:10.15184/aqy.2018.22

Werenskiold, Per. (2011). “The Most Sophisticated and Successful High-Speed Ships for Their Time.” 

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